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jeudi 18 novembre 2010

La Pensée de Bernard FRIOT



Bernard FRIOT est un sociologue et un économiste, j'ai fait ce texte à partir d'une émission de Daniel Mermet à laquelle il avait été invité : http://www.la-bas.org/article.php3?id_article=1965

Historique de la retraite :
La retraite par répartition est créée en 1853 dans la fonction publique, sous la forme de la continuation du traitement à l'arrêt de l'activité.
Dans le privé, les retraites se font par épargne jusqu'en 1941 où le gouvernement de Vichy crée la retraite par répartition sous la forme d'un minimum vieillesse par rapport à la grande précarité des vieux travailleurs inactifs. Cette retraite par répartition sera réévaluée à la libération.

Définition du terme de retraite par répartition :
C'est la société qui prélève une partie de ses gains annuels (le Produit Intérieur Brut) pour payer le salaire des personnes retraitées. Actuellement les gains annuels de la société française sont de 2 000 Milliards d'euros. Le pourcentage qui est pris pour la retraite est de 13% ce qui représente 260 Milliards d'euros pour payer le salaire de 14,5 millions de retraités.

Le taux de remplacement :
C'est le rapport entre le dernier salaire net et la première pension de retraite nette. Pour ceux qui ont pris leur retraite dans les années 90 et qui donc sont nés dans les années 30, ce taux est de 84 % en moyenne. Il a progressé de manière régulière de 45 à 90 et la réforme actuelle tente d'arrêter cette progression.
Actuellement, la retraite moyenne des femmes est à 1 100 € et celle des hommes à 1 700 €

Les salaires trop bas et le bobard démographique des emplois jeunes dans les années 70 :
Pour Bernard FRIOT, il est indispensable de revaloriser les retraites en faisant progresser le taux de remplacement jusqu'à 100 % . Mais cette progression doit également selon lui s'accompagner d'une revalorisation des salaires qui sont en général beaucoup trop bas dans notre société, cela en se référant toujours à la richesse produite par le pays. Ainsi, le revenu net médian (aides sociales comprises) est en France à 1 600 € et seulement 10 % des salariés gagnent plus de 3 000 € / mois.

Bernard FRIOT explique que le système capitaliste tend de manière générale à diminuer les salaires pour augmenter les profits.
Jusqu'en 70, les salaires ont augmenté de façon régulière dans la société française et la répartition de la richesse nationale était plus favorable aux salariés. Un indice de ce mouvement étant le salaire de première embauche.
Dans les années 70, la classe politique a eu la volonté de casser cette progression. Pour cela il fallait arrêter la progression du salaire d'embauche. Le pouvoir politique a donc créé artificiellement un « bobard démographique » : le taux de chômage des jeunes.
Bernard FRIOT démontre que le taux de chômage des jeunes n'était en fait, pas plus élevé chez les jeunes que dans le reste de la population. Ainsi, les statistiques disaient : un jeune sur quatre est au chômage. Oui mais c'était un jeune sur quatre actifs qui était au chômage or, seulement 30 % des jeunes sont actifs car les autres font des études , donc en fait, seulement un jeune sur douze était réellement au chômage ce qui se rapproche des taux normaux de chômage dans la société.
Du coup, comme le bobard a pris, on a pu créer des « emplois jeunes » et sous payer les dits jeunes, permettant ainsi l'acceptation progressive de la baisse du salaire d'embauche (mieux vaut un petit boulot que rien du tout) .
Bernard FRIOT explique à juste titre que l'acceptation de ce bobard démographique, s'est traduite par l'acceptation sociale du terme « emploi jeune » qui est tout à fait scandaleux et il nous dit : « aurions-nous de la même manière accepté le terme « emploi-femme » ? »
Du coup, la progression des salaires s'arrête et même diminue puisque progressivement, à partir des années 90 , 10 % de la richesse nationale vont passer des salaires aux profits. Profit qui part en fumée nous dit Bernard FRIOT mais nous reviendrons là dessus !

Le nouveau bobard démographique gouvernemental ; les « emplois vieux » :

Le gouvernement nous dit ; on ne pourra pas payer les retraites, c'est arithmétique en effet :
  • en 1960 il y avait 4 actifs pour un retraité
  • en 2010 il y a 2 actifs pour un retraité
  • en 2050 il y aura un actif pour un retraité.
Bernard FRIOT nous dit que cette argumentation est une argumentation de café du commerce. En effet, si on avait tenu le même raisonnement pour les agriculteurs, vu que leur nombre est passé de 45% de la population en 1900 à 3% en 2000, nous aurions du avoir une énorme famine. Or ce n'est pas le cas car le taux de productivité, c'est à dire la richesse produite par chaque travailleur augmente régulièrement. Ainsi, on travaille moins et on produit plus et il faut moins de salariés pour produire plus de richesses.
Ainsi l'argumentation du gouvernement tombe à l'eau car, le régime des retraites étant équilibré jusqu'en 96 au moins ( le soit disant déficit est un mensonge) et même peut-être légèrement excédentaire, on est passé sans problème de 4 actifs pour un salarié à 2 actifs pour un salarié. Bernard FRIOT insiste lourdement pour dire que le trou de la sécu est également un mensonge et que le financement du social se fait sans aucun problème en France. Le déficit actuel du système de retraite est conjoncturel, il est du au fait que depuis 96 les cotisations n'augmentent plus alors que les dépenses progressent normalement. Pour rééquilibrer les comptes il suffirait d'affecter une part minime de la croissance du PIB sur le social. Ainsi, il faut noter que les cotisations avaient augmenté de 8 à 26 % de 1950 à 1996. A partir de 96 tout stagne, les salaires n'augmentent que de 0,5% / an alors que le PIB augmente de 1,5 % , c'est la modération salariale mise en place pour que plus d'argent aille aux profits et à la spéculation. Comme la crise vient de la spéculation, on fait payer aux salariés les conséquences de la modération salariale.
En 15 ans, 10 points de PIB soit 200 milliards par an sont passés des salaires au profit. La crise vient en grande partie de là.
Ainsi, il ne faut pas rêver, malgré ce que claironne le gouvernement , nous allons vers une baisse du taux d'activité et du coup on s'arrête de travailler de plus en plus tôt. Actuellement l'âge moyen de la cessation d'activité est de 58 ans et la première cotisation retraite est prise en moyenne à 61,5 ans pour les hommes et 65 ans pour les femmes. Il y a donc une population précarisée pendant 3 ans pour les hommes et 7 ans pour les femmes. Du coup, le gouvernement est en train de nous faire le coup des emplois vieux comme il a fait le coup des emplois jeunes. On va créer une population aidée, une réserve de main d'œuvre à bas cout.

Pour bien se rendre compte de cela, il faut réaliser que si l'on voulait rémunérer un jeune actuellement comme dans les années 75 il faudrait doubler le salaire d'embauche (ceci bien sur en euros constants). C'est énorme et si on le faisait cela donnerait une formidable impulsion à la hausse pour tous les salaires.

Pourquoi nous pouvons payer les retraites sans aucun problème :

Pour mieux comprendre pourquoi le système des retraites est tout à fait viable, il faut reprendre quelques chiffres dont on ne nous parle jamais :
  • Ainsi, en 1960 le PIB est de 1 000 milliards d'euros et on consacre 5% de ce PIB aux retraites. Il reste donc 950 milliards d'euros pour les actifs, qui se répartissent entre les salaires, l'investissement et les profits (qui partent en fumée).
  • En 2000 le PIB est de 2000 milliards d'euros et on consacre 13% aux retraites soit 260 Milliards d'euros. Il reste donc 1 740 milliards pour les actifs, les salaires, l'investissement et le profit qui part en fumée.
  • En 2050 le PIB sera normalement de 4 000 milliards d'euros et si on veut une bonne retraite correcte à 100% pour tout le monde il faudra, d'après Bernard FRIOT, y consacrer 20 % du PIB soit 800 milliards d'euros mais cela veut dire qu'il restera 3 200 milliards pour les actifs, les salaires, l'investissement et le profit (qui part en fumée) donc, il n'y a aucun problème, il y a largement de quoi financer tout cela pour peu que l'on fasse une répartition honnête de la richesse nationale.

Si on nous fait croire que le système n'est pas viable, c'est à cause des banques et des fonds de pension qui veulent gagner toujours plus. D'après Bernard FRIOT, le problème le plus important que nous ayons vient de là, car les banques ne jouent plus leur rôle d'investissement. Elles ne prêtent plus comme elles doivent le faire.

Ainsi, Bernard FRIOT lance une idée tout à fait originale et révolutionnaire : sur le modèle des retraites et du social qui est financé sans épargne et qui fonctionne bien (il note que 88 % des pays européens ont adopté le système par répartition et que généralement les avantages sont meilleurs dans ce système), il faudrait financer de la même manière un fond d'investissement permettant de réaliser de l'investissement public sans épargne (donc sans profit). Cette idée est très intéressante car le taux d'investissement est beaucoup trop bas dans notre pays. Actuellement, l'investissement n'est fait que par les actionnaires et donc cela perturbe tout car ils n'investissent que dans les opérations très rentables au détriment des opérations de bien public. La création d'une caisse d'investissement publique permettrait d'affecter une partie du PIB à l'investissement sans épargne afin de faire progresser le niveau de vie.





Pas de chômage chez les retraités :
De la même manière et là aussi c'est révolutionnaire, il nous dit que le système des retraites actuel libère la force de travail de chaque citoyen.
En effet il part d'une fable rigolote : « Il n'y a pas de chômage chez les retraités  (chez ceux qui ont une retraite correcte, pas ceux qui sont dans la précarité)»! Cela fait sourire mais ce n'est pas si rigolo que cela parce que cela veut dire que les 7 millions de retraités qui ont une retraite correcte sont très actifs et chose encore plus étonnante, sont heureux d'être au travail. 7 millions de retraités actifs, cela représente 10% de la population, c'est énorme... 10 % de la population qui produisent de bonnes choses et qui sont heureux de le faire. Un travail que l'on ne remarque pas, mais qui doit tout de même représenter pas mal de choses non ? Si l'on part de l'idée qu'il y a en France deux actifs pour un retraité, cela donne 30 millions d'actifs et ce sont ces trente millions d'actifs plus les 7 millions de retraités actifs qui produisent les 2000 milliards de PIB , cela voudrait dire que les retraités produisent 378 milliards de richesse donc plus que le coût des retraites.

Donc, si on raisonne en termes généraux, les retraités produisent plus que ce qu'ils coûtent.

Et Bernard FRIOT de rajouter que d'après lui, un retraité qui produit des bonnes tomates est surement plus utile qu'un mathématicien de la finance qui fout le bordel dans tous les systèmes financiers ou un énarque qui décide de délocaliser une entreprise. Du coup, Bernard FRIOT nous dit sans sourciller, que la solution pour libérer le travail d'un emploi mortifère, c'est le salaire à vie.

L'emploi tue le travail :

En effet, si l'on regarde la situation de l'emploi actuellement en France, on se rend compte que dans la majorité des cas, l'emploi est ce qui empêche de travailler correctement et d'exprimer ses compétences. La majorité des salariés disent qu'ils font de la merde sur leur emploi et qu'ils ne peuvent pas faire ce qu'ils savent faire. Il s'agit donc de libérer les compétences et la force de travail de chacun pour éviter l'énorme gâchis que représente la situation de l'emploi actuellement. Ainsi, quand on voit l'argent investi pour former un jeune et ce qu'on va lui demander après sur le marché de l'emploi, c'est à gerber.
Face à cela , Bernard FRIOT préconise le salaire à vie seule solution d'après lui pour redonner de la vitalité au travail dans notre pays. Un salaire bien sur correct qui serait indexé sur l'expression des compétences avec un salaire de début autour de 2000 euros et un salaire de fin de carrière entre 6 et 8000 euros.
Face à cette affirmation surprenante et audacieuse, je me suis amusé à faire le calcul et ça colle. On prend 2000 milliards de PIB, on enlève un profit raisonnable à 3% soit 60 Milliards et un investissement de 10% soit 200 Milliards, reste 1740 pour les actifs qui sont 28 millions on divise 1740 par le nombre d'actifs et on arrive à un salaire moyen de 62 140 euros soit 31 070 euros de salaire net moyen annuel par an. Il est vrai que l'on en tombe un peu le cul par terre et on se rend compte que le salaire médian actuel qui est de 19 200 euros net est assez nettement explosé. Cela montre a quel point le profit nous plombe.




Les remèdes préconisés par Bernard FRIOT :

  • 1- Augmenter le taux des cotisations patronales de 7 points, et l'augmenter régulièrement de 0,5 points par an , cela permet déjà de rattraper le retard pris ces dernières années.
  • 2- investir tous les ans 1/6° de la croissance du PIB dans un fond d'investissement.
  • 3- remplacer les investisseurs prédateurs par de l'investissement public,
  • 4- Installer progressivement le salaire irrévocable à vie en fonction des compétences de la personne.


Effectivement il s'agit là d'un projet révolutionnaire dont on ne parle plus depuis 40 ans. En fait depuis les années 70 il n'y a plus aucune créativité, aucune utopie. On est dans un discours mortifère et défaitiste, on pense que ce sera pire pour les générations suivantes alors que nous sommes dans un pays riche, moderne qui peut donner à chacun une qualité de vie excellente pour peut que l'on finance cette qualité de vie en dehors de l'épargne lucrative..

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